Face au gel du programme avec le FMI, le Sénégal lance un nouvel emprunt obligataire de 526 millions $. Une opération stratégique pour financer ses priorités tout en testant la confiance des investisseurs régionaux
L’Etat sénégalais retourne sur le marché régional de la dette. Le Trésor public lance, ce mercredi 19 juin, un nouvel appel public à l’épargne d’un montant de 300 milliards de francs CFA (526,3 millions $). Objectif : financer des projets prioritaires dans un contexte de gel des discussions avec le Fonds monétaire international (FMI).
L’opération intervient alors que le dialogue entre Dakar et le FMI est au point mort depuis l’élection du président Bassirou Diomaye Faye (photo). Faute d’accord budgétaire avec les bailleurs internationaux, l’exécutif sénégalais cherche à diversifier ses sources de financement. Il mise désormais sur l’épargne locale, régionale et internationale.
Le dispositif retenu est un appel public à l’épargne (APE) ouvert du 19 au 30 juin 2025, avec trois maturités proposées : 5 ans à 6,60 %, 7 ans à 6,75 %, et 10 ans à 6,95 %. La valeur nominale est fixée à 10 000 FCFA. CGF Bourse est l’arrangeur principal de l’opération aux côtés de Société Générale Sénégal et SG Capital Securities West Africa.
Ces rendements, bien que fixes, s’inscrivent dans un contexte où la courbe des taux du Sénégal connaît des mouvements inhabituels. D’après les dernières données publiées par UMOA-Titres, le taux observé sur le marché des titres publics par adjudication est plus élevé sur la maturité 5 ans (7,58 %) que sur les maturités longues : 5,97 % à 7 ans et 6,07 % à 10 ans.
Autrement dit, les investisseurs demandent aujourd’hui une prime plus forte pour les emprunts de moyen terme que pour ceux de long terme, ce qui traduit une certaine incertitude sur l’horizon 2026–2027, période où le Sénégal devra commencer à rembourser ses eurobonds qui connaissent une forte décote depuis mars 2025. Les taux proposés pour cette nouvelle levée apparaissent plutôt compétitifs, notamment sur le 7 et le 10 ans. Le Trésor cherche à attirer des souscriptions sur les maturités longues, tout en maintenant des coûts de financement raisonnables.
Depuis le début de l’année 2025, le Sénégal a levé plus de 1036 milliards FCFA par adjudication, avec une nette accélération à partir de la mi-février, date à laquelle la Cour des comptes a révélé l’existence de 7 milliards de dollars de dette publique non enregistrée. Jusqu’à cette date-là, 185 milliards FCFA avaient été mobilisés.
A cela s’est ajouté, en avril, une levée de plus de 405 milliards FCFA via une opération par syndication, qui avait suscité un intérêt notable auprès des investisseurs institutionnels. Ce nouveau recours à l’épargne publique s’inscrit donc dans une séquence de financement accélérée, motivée par la volonté de préserver la continuité de l’action publique, en l’absence de flux multilatéraux.
Le montant levé servira à financer des projets dans des secteurs jugés prioritaires : éducation, santé, infrastructures, accès à l’eau, énergie, agriculture et numérique. Des domaines où les besoins sont considérables et les attentes de la population fortes, comme l’a rappelé le gouvernement dans un communiqué.
Source: Agence Ecofin
