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«L’Afrique ne vient pas les mains vides», parole d’Atepa

«L’Afrique ne vient pas les mains vides», parole d’Atepa - investactu.com

Pour le célèbre architecte sénégalais, il y a eu «maldonne» en Afrique. Il est temps que l’Europe prenne conscience des changements en cours. De passage à Genève, il propose des pistes pour de nouveaux partenariats.

«Si vous croyez être envahi par les Africains, attendez quelques années et vous verrez ce qu’il en sera si rien n’est fait pour éradiquer la pauvreté.» Pierre Goudiaby, alias Atepa, est une voix qui compte en Afrique. Le concepteur du Monument de la Renaissance africaine, la plus grande statue de bronze au monde, qui domine la corniche de Dakar du haut de ses 49 mètres, est de passage à Genève* pour «lancer un cri du cœur» : «Aidez-nous à créer des emplois chez nous, dans un nouvel esprit de partenariat.» D’ici une vingtaine d’années, la population des villes africaines va doubler. Kinshasa sera plus grande que Pékin. «Il faut créer de la richesse pour éviter que ces enfants embarquent sur des pirogues.»

Architecte, entrepreneur et président du Club des investisseurs du Sénégal, Atepa estime qu’il est temps que l’Europe comprenne la nouvelle donne internationale. Quelques jours après l’élargissement des BRICS et un G20 qui s’est ouvert à l’Union africaine, une «relecture des relations économiques s’impose». L’ancien conseiller du président Abdoulaye Wade explique que l’ère du FMI et de la Banque mondiale est dépassée. L’Afrique a changé. «L’Europe doit en prendre conscience. On s’est mal compris. Il y a eu maldonne. L’esprit colonial, ce n’est plus d’actualité. Passons à autre chose.»

Transformer par et pour l’Afrique

Ce qui change? Le pillage de l’Afrique, qu’il soit européen ou chinois, doit cesser. L’heure est à la transformation des ressources sur le continent. Des exemples? Atepa en a à profusion. La bauxite se trouve principalement en Afrique de l’Ouest. Ce minerai parcourt jusqu’à 15 000 km pour être transformé en aluminium à Dubaï ou en Corée du Sud. Il faut 15 000 autres kilomètres de transport pour le ramener au Sénégal. Alors que les mines sont à 600 km de Dakar, en Guinée. A l’avenir, la bauxite comme le fer et tout autre minerai devront être valorisés sur place. L’exploitation de l’uranium nigérien est un autre cas de «maldonne». «Après soixante ans d’indépendance et l’extraction de milliers de tonnes d’uranium, la France n’avait toujours pas pris la décision de sortir le pays de la pauvreté, d’offrir une voie de développement», regrette Atepa.

Doté de nouveaux gisements de gaz et de pétrole, le Sénégal pourrait développer une industrie pétrochimique profitant à l’ensemble du continent. Il faut pour cela la technologie et le savoir-faire. Les Européens devraient être aux premières loges pour une coopération partant sur de nouvelles bases. «Je veux développer une nouvelle route de l’acier et de l’aluminium, à l’exemple des nouvelles Routes de la soie chinoise, mais au profit de l’Afrique. Et je ne viens pas les mains vides», explique l’homme de 76 ans. De bons partenariats, il en a noués par le passé. Avec l’Inde notamment. Tous les bus de Dakar sont des Tata, et non des Renault. «Les Indiens nous ont livré les pièces détachées, mais l’assemblage s’est fait au Sénégal. Cela profite à l’emploi local.»

Le cas de l’or sénégalais

Atepa veut dire «le bâtisseur» en diola, la langue maternelle de Pierre Goudiaby. Celui-ci a développé un concept de villes nouvelles, pour absorber l’explosion démographique en cours. L’idée est de définir un périmètre et de le diviser en trois: un tiers est conservé pour les populations rurales converties à l’agriculture intensive, un tiers en espace vert et un tiers pour un nouveau pôle urbain. «On n’expulse pas les gens comme en Chine, on réorganise», explique-t-il. C’est le modèle appliqué à Kitoko, la future capitale administrative de la République démocratique du Congo, à une centaine de kilomètres de Kinshasa.

Lors de son dernier passage à Genève, il y a trois mois, pour des rendez-vous d’affaires planifiés sur quatre jours, Atepa s’est vu délivrer un visa de quatre jours. Pas un de plus. «C’est un manque de respect», estime un homme qui sillonne la planète pour convaincre les investisseurs de croire en l’Afrique. Il y voit un malheureux amalgame. «C’est vrai que des gens viennent vous encombrer. Mais ne pensez pas que tous les Africains pensent à vous encombrer. Aidez-nous plutôt à nous en sortir, ensemble.» Par exemple en repensant l’exploitation de l’or au Sénégal. Pourquoi l’essentiel de sa production, réalisée dans des conditions précaires, prend-elle le chemin de la Suisse? «D’où vient cet or? Dans quelle condition est-il extrait? Pourquoi n’est-il pas raffiné au Sénégal? Il serait peut-être temps que vos parlementaires mettent leur nez dans cette filière.»

* Pierre Goudiaby sera l’un des invités de marque du colloque «L’Afrique face aux défis du numérique, de l’industrialisation et des enjeux de la culture et du développement» organisé par l’Université de Genève et ContinentPremier.com

Source: Le temps

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